L'une chante, l'autre pas

Durant cinq ans, le réalisateur Sébastien Lifshitz a filmé le quotidien de deux «Adolescentes» et nous livre une belle chronique sur l’amitié à l’épreuve du temps.

 

Après Leadolescentesjpgs invisibles , l’histoire d' homosexuels dans l’entre-deux guerres, Bambi le témoignage d'une des premières transgenres françaises et tout récemment Petite fille diffusé sur Arte, il suit, dans son nouveau documentaire, deux adolescentes, Emma et Anaïs, habitantes de Brive-la-Gaillarde, que tout oppose.

Emma, la brune rêveuse, indolente, Anaïs, la blonde, extravertie, optimiste sont meilleures amies depuis la 6ème. Bien que d’origines sociales très différentes (milieu aisé et milieu prolétaire) elles aiment à se retrouver au plan d’eau pour discuter de leur rêves, leurs aspirations, leurs craintes quant à leur avenir sentimental et professionnel.

Le réalisateur les filme également chacune dans leur cadre scolaire, familial, ou amical. Nous sommes témoins de leur disputes récurrentes avec leurs parents, de leurs moments de tendresse et de leurs réactions quand l’actualité fait irruption dans leur vie (attentats de Paris, élections présidentielles). Sans voyeurisme, avec beaucoup de discrétion, Sébastien Lifshitz arrive à entrer au cœur de l’intime de ces jeunes filles représentatives de la France actuelle. Comme lui on s’attache à ces deux ados et comme lui on aimerait savoir ce qu’elles vont devenir plus tard.

Un prix Louis Delluc bien mérité !

 

 

Dis-moi qui tu es, je te dirai d’où tu viens !

 

Un quart de la population de notre pays a des racines venues d'ailleurs, hors de nos frontières.

La France est peuplée de descendants d’Espagnols, de Portugais, d’Italiens, de Cambodgiens, de Marocains,    d’Algériens, d’Arméniens et autres.

L’union fait la force.

La révolte de Valtis met en scène une jeune héroïne qui, par amour, passe de la résignation à la rébellion contre les oppresseurs qui ont envahi sa planète.
Sharon Shinn et Moly Knox Ostertag signent une série de science-fiction accrocheuse, au scénario et au dessin agréables, pour les pré-ados et ados.

Depuis que les Drix ont envahi la planète de Coline, la vie est un enfer. Ils ont réduit le peuple en esclavage pour exploiter des mines contenant un produit essentiel pour leurs vaisseaux et la suite de leurs conquêtes. Obligée de travailler dans une usine de tri du minerai, Coline, une jeune orpheline, fait la connaissance de Tim, qui s’avère être un Valtis, un combattant de l’ombre qui lutte contre l’occupation des Drix. Malgré les risques, la jeune femme décide alors de s’engager dans la résistance.

Sharon Shinn a déjà publié de nombreux romans et fait là sa première incursion dans le monde de la BD. Ce parcours initiatique en temps de guerre où une jeune héroïne courageuse décide de prendre son destin en main, est prenant du début à la fin, avec juste ce qu’il faut d’action, de rebondissements, de dangers et d’émotions. Il est porté par des personnages attachants et un dessin agréable, aussi simple qu’efficace. On suit la lutte pour la survie et la découverte amoureuse de l'héroïne avec intérêt.
Une histoire de résistance pleine d’humanité mettant en valeur entraide et courage.

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Maladie orpheline.

Par le biais d’une fiction, Journal d’un enfant de lune, Joris Chamblain, le scénariste de l’excellente série Les Carnets de Cerise, et Anne-Lise Nalin nous font découvrir le calvaire des enfants atteints du syndrome XP, une maladie de la peau qui les empêche de vivre à la lumière du jour.

Morgane, une jeune ado un peu rebelle, vient d’emménager dans une nouvelle maison avec sa famille. Derrière un radiateur, elle découvre le journal intime de Maxime, ancien locataire de la chambre. Au fil de sa lecture, elle découvre un ado romantique atteint d’une maladie génétique orpheline, le Xeroderma Pigmentosum, qui l’empêche de sortir le jour sans une lourde protection contre le soleil, sous peine de développer des cancers de la peau. Elle y découvre sa souffrance, surtout celle de ne pas pouvoir vivre comme les autres enfants, sa colère, ses espoirs… Elle se prend d’amitié pour le jeune homme, en devient même amoureuse et décide de le retrouver …

Cette bande dessinée permet de nous sensibiliser à cette maladie rare, aux difficultés de vie de ces jeunes, sentiment d’isolement et problèmes d’intégration, et des proches, car rien n’est vraiment prévu pour y faire face. Mais c’est aussi l’histoire de la quête de Morgane pour retrouver cet inconnu, quête qui la fera mûrir d’un coup. 

Un récit juste et délicat, auquel Anne-Lise Nalin apporte de la douceur. Ses couleurs, tantôt chaudes, tantôt froides, retranscrivent au mieux les ambiances et les sentiments des personnages. 
Une partie des bénéfices de vente de l’album est reversée à l’association « Enfants de la lune » qui aide les familles à apprivoiser les multiples bouleversements engendrés par cette maladie et qui finance en partie la recherche.

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Retour à la vie sauvage.

Silver, le nouveau chien du fermier, s’ennuie tellement à garder son troupeau de brebis, qu’il part à l’aventure dans la forêt. Une rencontre va changer sa vie…
Sur fond de quête de liberté, si fascinante mais dangereuse aussi, Clayton Junior met en scène dans Ma vie de loup, une aventure animalière drôle et touchante, une fable écologique accessible aux plus jeunes.

Silver est un gentil labrador, pas très doué pour son travail et malaimé par son maître. Les rengaines des brebis l’accablent. Il rêve de liberté, de grands espaces. Parti explorer la forêt, il rencontre une meute de loups et s’enfuit avec eux pour goûter à la vie sauvage, une vie d’aventures et sans contrainte. Il connaîtra l’amour, des moments d’exaltation mais aussi de peur, de chagrin, de fuite. 

La réalité se révèle bien éloignée du rêve. Pour survivre les loups doivent courir tous les dangers. Le gibier est rare et les ravages de la civilisation sur la nature menacent leur existence. 

Avec un graphisme simple, expressif et des couleurs lumineuses, Ma vie de loup est album teinté d’humour qui met en avant le courage, la fidélité en amitié et en amour et le respect de la nature.

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Robin des bois au féminin.

Après les excellentes séries Violette autour du monde et Le port des marins perdus, Teresa Radice et Stefano Turconi imaginent Tosca des bois, une très belle aventure médiévale prometteuse, une histoire d’amitié sur fond de différence.

En l’an de grâce 1342, au château de Castelguelfo en Toscane, Lucilla, la fille unique du seigneur local, 13 ans, cloîtrée depuis ses plus jeunes années et sans amis, s’ennuie à mourir. L’intrusion d’un voleur lors du banquet donné en l’honneur de ses futures et contraintes fiançailles, va lui offrir l’occasion de sortir du château. Elle se lie d’amitié avec deux orphelins vivant dans la forêt toute proche : Rinalto, poète, sa sœur Tosca, véritable garçon manqué et débrouillarde, avec lesquels elle va vivre de belles aventures.

Avec de magnifiques planches douces et chaleureuses au léger effet suranné, l’ambiance médiévale est parfaitement restituée par Stefano Turconi. Tout concourt à en faire une série immersive : action et humour, intrigue prenante et parfaitement rythmée, personnages attachants et courageux. Vivement la suite !

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L’annexe.

Sur proposition de la fondation Anne Frank, Ari Folman, le réalisateur du film d’animation Valse avec Bachir, et le dessinateur David Polonsky, adaptent en roman graphique Le journal d’Anne Frank, pour perpétuer sa mémoire auprès des nouvelles générations.
Le défi est relevé avec brio, les auteurs retranscrivent au mieux l’esprit du journal et de son auteur.

Très proche de l’original, ce roman en reproduit certaines pages. Il décrit la cohabitation difficile de cette jeune Juive, de ses parents, de sa sœur et d’une autre famille, dans un appartement caché de l’entreprise paternelle, à Amsterdam. Les carnets débutent le 12 juin 1942 et s’achèvent le 1er août 1944.

Pas facile de condenser cette œuvre, pourtant les auteurs y parviennent aisément. Nous (re)découvrons la personnalité particulière de la jeune fille, ce mélange d’humour et de lucidité sur sa situation et son impressionnante maturité au point d’oublier qu’elle n’était qu’une enfant. L’immersion dans cette période et dans ce petit microcosme est très bien restituée.

Graphiquement, c’est subtil, juste, ironique, à l’image d’Anne. Le dessin se fait tour à tour réaliste, onirique ou métaphorique et parvient à rendre visibles ses pensées, ses humeurs, ses états d’âme. Il exagère le burlesque des situations, le ton cocasse du journal et croque les défauts et les caractères du petit monde de l’Annexe avec beaucoup d’humour.

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Chasse au trésor au cimetière.

Deux jumeaux, fréquemment ridiculisés par leurs camarades car ils sont les enfants de croque-morts, se lancent pour tromper leur ennui, dans une chasse au trésor dans un cimetière.
Dans ce premier tome de la trilogie Les Croques, Léa Mazé confirme son talent que l’on avait déjà perçu dans son excellente première BD, Nora.. Suspense haletant, relations difficiles avec l’entourage sont au cœur de cet album prometteur.

Jumeaux, Céline et Colin font tout en duo, devoirs et…bêtises. En raison de la profession de leurs parents qui dirigent une entreprise de pompes funèbres, ils subissent les railleries de leurs camarades. Solidaires, ils s’entraident, ne se laissent pas faire, ripostent en se battant et sont souvent punis par les professeurs. Chez eux, ce n’est guère mieux : leurs parents débordés ne leur accordent aucune attention et ne les comprennent pas. Leur dernière bagarre leur rapporte une exclusion de deux jours et une punition supplémentaire de leurs parents : nettoyer le cimetière accolé à leur boutique. Ils s’y ennuient ferme, jusqu’à ce qu’ils découvrent des marques étranges inscrites sur les tombes. Une énigme qui va les embarquer dans une enquête aussi palpitante que terrifiante…

On retrouve avec plaisir le doux crayonné de Léa Mazé, à la fois simple et atypique, et son talent pour installer des atmosphères particulières grâce à l’usage judicieux des couleurs et des effets d’ombres et de lumières. Les tons bleus et orangés se fondent à merveille dans les lieux et créent une ambiance pleine de mystères et un peu anxiogène.

Tout en abordant des thématiques liées à l’adolescence, Léa Mazé met en scène deux jeunes attachants et mal dans leur peau, qui vont avoir recours à leur imaginaire pour améliorer leur triste quotidien. L’album se termine par un cliffhanger particulièrement fort qui donne envie aux fans de frissons et de mystères de découvrir la suite au plus vite.

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